REPORTAGE : Dans l’univers insalubre du marché Thiaroye-Gare (Photos)…

Thiaroye-Gare abrite l’un des plus grands marchés de la banlieue. L’insalubrité conjuguée à l’odeur nauséabonde des eaux usées ruisselantes campe le décor peu enviable. Marché Thiaroye-Gare, il est 9 heures du matin ce mardi 19 septembre 2023. L’accès aux étals des vendeurs de légumes est difficile. Très difficile même, à cause des nombreuses déviations imposées par le passage du TER. Le décor est peu enviable.

Des chemins parsemés de nids de poule et de flaques d’eau. Des passages inondés. Des lieux infestés de moustiques et d’insectes de toutes sortes.

Ce n’est pas encore le grand rush en cette matinée d’hivernage lorsque la fraîcheur du jour se conjugue à un ciel nuageux qui menace d’ouvrir ses vannes. Ici, l’odeur ocre du piment pique les narines. Ça pue l’odeur nauséabonde des eaux qui ruissellent des fosses septiques, à cause d’un assainissement défaillant. Les vendeurs étalent leurs produits près des or-dures.

Sur le flanc, des porteurs de bagages s’activent à la recherche effrénée de clients. Ils se précipitent vers cette dame qui vient à peine d’arriver. Ils se bousculent auprès des clients venant de descendre du car rapide, pour les accompagner dans leurs achats, moyennant quelques billets. Dans la foulée, de jeunes garçons vendent des sacs aux acheteurs. Non loin, les petits camions déchargent les légumes.

Ordures, vétusté, eaux usées, maladies…

C’est l’un des plus vieux marchés de la banlieue. On y retrouve plus de cinq mille commerçants, toutes nationalités confondues. Ces derniers déplorent l’état des lieux insalubre et insécure, en cette période hivernale. «Le marché devient un dépotoir d’ordures. En arrivant ici, vous pouvez voir le désordre. C’est vraiment déplorable d’affronter tout le temps cette dure situation. Malgré cette insalubrité, nous sommes obligés de venir travailler. Après tout, nous sommes des soutiens de familles», se lamente Fallou SENE en tenue sous-vêtement. C’est un jeune vendeur de poissons secs présent sur les lieux depuis 15 ans. 

Notre interlocuteur invite le gouvernement à nommer un directeur général, pour une meilleure gestion de ce lieu de commerce. «Le marché doit avoir des parkings pour les camions. Et l’Etat doit faire en sorte qu’un Directeur gère ce marché et non ces promoteurs qui ne pensent qu’à leur propre profit. Il n’y a pas de DG comme le marché des poissons et SOGAS (ex-SERAS). On a vraiment besoin d’aide pour l’amélioration du marché», dit-il.

Non loin, le Guinéen Abdoulaye BARRY vend des légumes. Dans son étal, il expose des patates et des aubergines près des eaux usées ruisselantes. «Le marché est trop sale, je n’ai d’autre choix que de m’installer ici. Nous sommes exposés à toutes sortes de maladies, c’est pourquoi je porte des bottes», laisse entendre l’homme au teint clair en déguisement traditionnel aux couleurs du drapeau national.

Ni poubelles, ni canalisations

Ici, commerçants et clients s’exposent à des maladies. Le palu, la gale, les infections ou encore les maladies de la peau sont les pathologies les plus fréquentes. Vendeuse de légumes, Safy DIEMÉ, 40 ans révolus en est une victime «Il y a deux semaines, j’avais des boutons au niveau des pieds et depuis lors j’achète des sachets d’eau de javel pour nettoyer mes pieds après mes courses. J’ai l’habitude de faire les achats ici. Mais durant l’hivernage, ces lieux deviennent méconnaissables», se plaint notre interlocutrice. «Le marché doit être nettoyé et faire en sorte qu’il ait de bonnes canalisations. Sinon, les personnes qui viennent ici risquent de tomber malades à cause de cette saleté», recommande-t-elle.

Même si l’état du marché reste déplorable, certaines femmes continuent tout de même de le fréquenter, malgré la cherté des denrées. Pace que les prix semblent convenir à leurs bourses. «J’ai l’habitude de venir ici. Je peux avoir le nécessaire pour quatre jours avec trois mille FCFA. Contrairement au marché de mon quartier où je peux dépenser cinq mille FCFA par jour sans obtenir le nécessaire», confie Aïda, une vieille ménagère venue de Keur Massar.

Malgré les taxes journalières prélevées chez les vendeurs par les agents de la mairie, aucun changement n’est visible, pour l’amélioration des conditions. «On paye chaque jour la taxe, mais on a l’impression que les dirigeants du marché font la sourde oreille face à l’état dégradé des lieux. Ils ne tiennent pas compte de notre désarroi», dénonce Moussa DIOUF, vendeur de citrons à la taille svelte.

 «L’état du marché est inexplicable. Vous pouvez le constater par vous-même. Certains clients préfèrent aller dans les supermarchés pour acheter les légumes que de venir ici en période d’hivernage. La construction des canaux d’évacuation est le problème majeur ici», ajoute Bécaye BA, un des candidats à la désignation des délégués du marché qui aura lieu le 15 octobre. «Ce marché fait une entrée de 700 mille FCFA par jour. Et ce montant peut connaître une hausse si les canalisations sont mises en place dans le marché», ajoute-t-il.

La mairie reconnait ses limites

De son côté, la mairie de Thiaroye-Gare pleure son budget limité pour faire face aux besoins du marché. «La municipalité a une façon de gérer la commune. Le marché fait partie de nos priorités, mais notre budget ne nous permet pas de tout faire, on a une limite», reconnait Lamine GUEYE, agent de la mairie.

Il poursuit : «A l’entrée du marché vers la parcelle des vendeurs de patates, il y a une route pavée avec une canalisation pour la meilleure évacuation des eaux pluviales». Seulement,  «ce projet a été financé par des bailleurs et non pas le budget de la mairie».

Avec sa clientèle diverse, le marché Thiaroye-Gare affiche un visage hideux. Mais il continue tout de même son rythme d’exportation et d’importation à grande échelle de légumes. C’est aussi un haut lieu d’approvisionnement de nombreux commerçants venus des marchés environnants.

Alimatou Sadiya BADJI

(Stagiaire)

Rédacteur en Chef

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