Sénégal: le report de l’élection présidentielle entraîne des violences et une vague de répression 3 morts, 60 blessés, au moins 271 personnes arrêtées, et des journalistes agressés, selon l’ONG HRW

Chaînes d’approvisionnement interrompues, gel des investissements, pertes et manques à gagner commerciaux,… La liste des potentielles pertes économiques résultant du report de l’élection présidentielle est longue. Explications...

Les autorités sénégalaises devraient immédiatement ouvrir des enquêtes indépendantes sur les violences survenues lors des manifestations des 9 et 10 février 2024, à la suite du report de l’élection présidentielle, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui.

Au moins deux jeunes hommes et un garçon de 16 ans sont morts, des dizaines de personnes ont été blessées et au moins 271 personnes ont été arrêtées. Des manifestations ont éclaté à Dakar, la capitale du pays, et dans plusieurs autres villes après l’annonce par le président Macky Sall que l’élection présidentielle, prévue pour le 25 février, serait reportée. Le 6 février, le parlement sénégalais a voté le report de l’élection au 15 décembre après une session chaotique de l’Assemblée nationale au cours de laquelle les forces de sécurité ont évacué des députés de l’opposition. Les autorités n’ont pas encore publié le nombre de morts ni de personnes blessées et arrêtées lors des manifestations. Les autorités devraient libérer toutes les personnes détenues pour avoir exprimé leurs opinions politiques, garantir le droit à la liberté de réunion, et mettre fin aux agressions contre les journalistes.

« Les récents décès et blessures de manifestants ne devraient pas conduire à de nouveaux abus », a déclaré Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior à Human Rights Watch. « Les autorités devraient contrôler les forces de sécurité, enquêter sur les personnes impliquées dans les abus et les tenir responsables. » Human Rights Watch a mené des entretiens téléphoniques avec 29 personnes, dont 5 manifestants, 7 activistes de la société civile, 8 membres de l’opposition, 5 journalistes, 2 avocats et des proches de 2 personnes blessées. Human Rights Watch a également examiné les dossiers médicaux des personnes blessées ou tuées, des photographies et des vidéos montrant les morts et les blessés, de nombreuses images des manifestations, ainsi que des rapports publiés par les médias nationaux et internationaux. À Dakar, des témoins ont déclaré que les forces de sécurité avaient dispersé des centaines de manifestants et d’autres citoyens autour de la Place de la Nation, tirant à bout portant des balles réelles et en caoutchouc et des gaz lacrymogènes. Modou Guèye, 23 ans, a été abattu à bout portant par un gendarme et est décédé à l’Hôpital Principal le 10 février des suites de ses blessures. Un proche de Guèye a déclaré que celui-ci vendait des vêtements et qu’il ne manifestait pas. Human Rights Watch a examiné le dossier d’hospitalisation de Guèye, qui indique qu’il est décédé des suites de blessures « dans la région thoraco-abdominale » causées par une « arme à feu ». Selon l’opposition, une soixantaine de personnes ont été blessées lors de manifestations à travers le pays. « La police a tiré une grenade lacrymogène qui m’a touché », a déclaré un homme ayant manifesté le 9 février dans le quartier de Colobane à Dakar. « J’ai une fracture au pied droit et une blessure à la cuisse droite. »

Des témoins ont dit que les manifestants à Dakar ont réagi en construisant des barricades, en bloquant les routes, en brûlant des pneus et en lançant des pierres sur la police. Ailleurs dans le pays, notamment à Mbour, Mbacké, Tivaoune, Touba, Saint Louis et Ziguinchor, les forces de sécurité auraient également eu recours à une force excessive pour disperser les manifestants. Alpha Yero Tounkara, un étudiant en géographie âgé de 22 ans, est décédé le 9 février lors de manifestations dans une université de Saint-Louis, dans le nord du pays. Le 10 février, le ministre de l’Intérieur a déclaré dans un post Facebook qui a ensuite été supprimé que « le procureur de la République a été prié de mener une enquête pour déterminer les causes et les circonstances du décès » mais que les forces de sécurité « ne sont pas intervenues sur le campus universitaire où le décès est survenu ». Toutefois, les médias ont cité des témoins et des sources médicales, judiciaires et universitaires affirmant qu’un gendarme a tiré sur Tounkara dans les côtes dans l’enceinte de l’université. Toute enquête sur la mort de Tounkara ne devrait pas être influencée par les déclarations de responsables gouvernementaux, a insisté Human Rights Watch. Le 10 février, de violentes manifestations ont éclaté dans la ville de Ziguinchor, dans le sud du pays. Des témoins ont déclaré que la police avait dispersé les manifestants en tirant à balles réelles et en lançant des gaz lacrymogènes. « Ils nous ont tiré dessus de façon indiscriminée », a déclaré un manifestant de 32 ans.

« Cinq de mes amis ont été blessés par balles réelles ; l’un d’eux, Landing Diédhiou, a été touché à la tête et est décédé des suites de ses blessures environ une heure après que nous l’avons transporté à l’hôpital régional. »

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